Journal intime d'une bipolaire

42 ème jour...

Je sais bien que d’ici quelques jours tout va retomber et que je serai de nouveau en prise avec ma morne existence… Mais pour l’heure depuis ce matin je suis un peu "excitée". Pour quelle raison vous demandez vous ? Et bien je me suis aperçu ce matin que mes dernières règles remontaient à 42 jours au lieu de 39 comme je le pensais. Non pas que j’espérais tomber enceinte mais évidemment tout changement potentiel dans ma vie me donne envie de regarder plus loin. Nous utilisons des préservatifs à chaque rapport sexuel mais c’est vrai qu’il entre toujours en moi sans et que je ne suis pas sans ignorer (et lui non plus d’ailleurs) que le liquide séminal contient des spermatozoïdes. Cependant c’est un "détail" que nous laissons de côté la plupart du temps. Certes c’est une conduite irresponsable pour un jeune couple qui ne désire pas d’enfants tout se suite mais si je tombais enceinte c’est que inconsciemment nous le souhaiterions… Oui je sais la réalité n’est pas aussi belle mais bon, il sait très bien pour le liquide séminal et le risque que nous prenons. Il sait aussi que mes cycles sont totalement irréguliers.
L’année dernière a peu près a la même époque, j’ai eu un retard de règles assez important et nous avons discuté de ce qu’il se passerait si j’étais enceinte. Et bien il aurait voulu que j’avorte parce qu’il n’aurait pas pu assumer cet enfant. Les choses n’ont pas beaucoup changées depuis l’année dernière si ce n’est qu’il a réussi son concours de médecine, qu’il donne des cours de soutien qu’il lui rapporte un petit peu d’argent. Moi j’ai repris le chemin de l’école même si je suis toujours morte de trouille pour la suite. Et puis entre temps je me suis aussi mise à fumer des joints et j’ai trahi sa confiance… Hum… bon question avenir financier dans une dizaine d’années il sera assuré si nous restons ensemble et qu’il devient médecin comme prévu mais si je suis enceinte à cet instant il ne peut pas subvenir aux besoins d’un enfant. Quant à moi, quand je pense à un bébé je fantasme sur le fait que ça me donnerait la liberté de faire ce que je veux de ma vie. Je sais pourtant que c’est totalement irréaliste. Pour en revenir à mon copain, il n’est même pas sur de vouloir rester avec moi alors n’en parlons pas d’avoir un enfant avec moi… Ce serait dingue d’être enceinte et de le garder. Dois t-on prendre en compte l’existence du père dans ce genre de décisions ou doit on jauger de nos capacités à élever seule un enfant avec tout ce que cela comporte de responsabilités ? Je ne suis même pas capable de m’occuper de moi même alors comment m’occuper d’un bébé ? Non ce serait vraiment de la folie. Et pourtant avorter serait un prétexte, une raison, une explication pour justifier une longue dépression. D’une part a mes propres yeux et ensuite aux yeux de la société. On peut comprendre qu’une jeune fille déprime après un avortement plutôt que déprime sans raison apparentes. Et moi je me dirai que si j’ai ôté la vie à un bébé c’est que je ne mérite pas non plus de vivre et que je devrais aller le rejoindre etc etc. Donc avorter me ferait me sentir encore plus mal que je ne le suis déjà.
Le garder alors ? Pour quelles raisons ? Pour avoir une raison de vivre ? N’est ce pas égoïste ? Et si ça ne marchait pas ? Si après la grossesse et les premiers mois de sa vie je me rendais compte que ça ne me donne toujours pas envie de vivre que d’être mère ? Alors j’aurai encore plus de mal à partir si je devais laisser un enfant derrière moi. Je ne pourrais jamais faire ça à un enfant, jamais. Alors probablement je le tuerai juste avant de m’ôter la vie. Ben dis donc ça commence bien… Je ne sais même pas s’il existe, que déjà je songe à le porter, le mette au monde et le tuer… Vachement prometteur tout ça ! Bon admettons que cet enfant fasse s’envoler mes troubles divers et variés… Comment je subviendrais aux besoins de cet enfant ? Pour l’instant hors de question que mon copain arrête ses études pour travailler. Il m’en voudrait trop et ce serait impossible à supporter. Mes parents pourraient nous aider le temps que je trouve du travail même si ce serait difficile de leur demander cela. Je pourrais finir ma première année en attendant de savoir si je peux continuer ou pas mes études d’infirmière. Je pense qu’il y’a toujours une solution. Qui regrette de ne pas avoir avorté ? Personne à ma connaissance. Alors je crois qu’envers et contre tous je pourrais bien le garder ce bébé s’il était en train de pousser à l’intérieur de mon ventre. Oui. Cependant cela ne sert a rien de m’obséder avec ça parce que je suis sûre que mes règles arriveront dans quelques jours tout au plus et que je retournerais à ma morne existence…
J’ai souvent des cycles longs alors elles arriveront bien sûr.
Ça ne empêche pas de psychoter un peu en me disant que depuis quelques jours après chaque repas j’ai des brûlures d’estomac, que ce qui s’est passé hier soir s’explique peut être par la sécheresse vaginale connue de certaines femmes enceintes, le fait que j’ai tout le temps faim et que je sois très souvent fatiguée… Mais bon à part les brûlures d’estomac je ne crois pas que les autres "symptômes" soient vraiment des "symptômes" en ce qui me concerne. J’ai tout le temps faim et je suis tout le temps fatiguée de toute façon. Et bien la seule chose qui reste à faire c’est d’attendre… Si lundi prochain il n’y a toujours rien je ferai un test… Mais pas avant lundi ! Parce que je sens que ça va arriver ce soir… Je ne peux pas être enceinte...
Ce serait trop… beau?... pour être vrai…